Mardi 22 septembre, Madame Luce Pane (Seine-Maritime – SRC), Rapporteure pour avis sur les crédits de la mission « Solidarité » du projet de loi de finances pour 2016, a reçu en audition Monique Dupuy, administratrice de l’UNAF, Présidente du Département « Cohésion sociale et vulnérabilités », Mme Agnès Brousse, Responsable du service « Évaluation et développement des activités », et Mme Claire Ménard, Chargée des relations parlementaires.
L’audition a principalement porté sur le dispositif de la protection juridique des majeurs.
En introduction, la Députée a souhaité avoir une présentation de l’UNAF dans ce dispositif. Il a été rappelé que la gestion de mesures de protection entrait dans les quatre missions de l’Institution familiale (représenter les familles, donner avis aux pouvoirs publics, ester en justice et gérer tout service d’intérêt familial). Le réseau des UDAF a en charge 40 % des mesures de protection du secteur associatif. Les UDAF sont en conséquence le 1er opérateur avec 140 000 mesures. L’audition s’est ensuite déroulée autour des questions suivantes.
L’UNAF a rappelé sur ce point, qu’elle avait été une ardente contributrice à la réforme. La loi est intervenue après une longue gestation et a été porteuse de grandes avancées :
- Le sujet principal sur le rôle des familles dans le dispositif réside dans la volonté des pouvoirs publics de pérenniser l’information et le soutien aux tuteurs familiaux (ISTF) par un financement pérenne de la mesure. L’ISTF est prévue dans la loi et un décret d’application encadre sa mise en œuvre. Les UDAF se sont fortement impliquées dans cette mesure car c’est le moyen d’accompagner les familles lorsqu’elles veulent se charger de la protection pour un membre de la famille. Or l’exercice des mesures de tutelle ou la curatelle peut leur faire peur. Les cas d’intervention de telles mesures révèlent des réalités, qui sont difficiles à vivre pour l’entourage : perte d’autonomie, difficultés cognitives … Il est dès lors essentiel d’expliquer, d’informer sur les mesures de protection pour clarifier et rassurer les proches susceptibles d’exercer la mesure, ou pour accompagner ceux qui l’exercent déjà. Il est nécessaire de préciser ce que doit être un inventaire, un compte de gestion, ce que sont les droits de chacun. A côté de ce soutien technique pour sécuriser la mesure, il y a également un travail d’écoute à assurer. Une mesure de protection prise par un tuteur familial a des conséquences : cela modifie les relations vis-à-vis du parent vulnérable et de la fratrie. C’est aussi cet accompagnement, qui est engagé au travers du dispositif de l’ISTF.
D’autres associations que les UDAF sont amenées à intervenir dans l’ISTF, dispositif prévu par la loi qui requiert une inscription sur la liste départementale. La loi a créé ce service, mais aucun financement dédié n’est pour l’instant prévu. Les expérimentations conduites notamment par les UDAF ont montré sa pertinence. Il est urgent de trouver un financement pérenne de l’ISTF via la DGF ou via les crédits de la CNSA ouverts pour la formation des aidants familiaux. La CNSA est sensible à cette question de l’accompagnement des aidants familiaux, même si la population des tuteurs familiaux ne recouvre pas totalement celle des aidants familiaux.
L’UNAF a souligné qu’il n’existait pas de données nationales récentes permettant d’en mesurer l’évolution depuis sa mise en œuvre en 2009. Les statistiques de la DREES et de la DGCS datent de fin 2011 : elles montrent que la mesure n’a pas connu l’essor escompté avec environ 10 000 MASP sur tout le territoire.
Il est important de distinguer entre MASP et mesure de protection. Les publics ne sont pas les mêmes et n’ont pas les mêmes besoins. Les modes d’intervention sont également bien différents. S’agissant des MASP, seules les personnes allocataires de prestations sociales en bénéficient, ce qui constitue aussi une limite à leur développement. Une des recommandations du Livre blanc sur la protection juridique des majeurs était qu’elle puisse aussi être prononcée pour d’autres publics. Une des explications du faible nombre de MASP tient au fait que d’autres dispositifs d’accompagnement social existent tels que l’action éducative budgétaire ou bien encore l’accompagnement social lié au logement, qui s’inscrivent davantage dans la culture du travail social des départements.
Car la MASP a la singularité de permettre de gérer des prestations, ce qui n’est possible avec aucune autre. Il s’agit d’un outil inédit pour le travail d’éducation budgétaire.
Les Conseils départementaux appliquent très variablement ces mesures. Il semble qu’ils aient tendance à la gérer, de plus en plus, en direct. A ce jour, il n’existe pas d’évaluation nationale de cette politique publique décentralisée. La mesure est limitée dans le temps, non coercitive, contractualisée. Elle est censée s’inscrire dans un processus préventif … Il est regrettable que ce dispositif soit peu utilisé alors qu’il constitue un bon outil de lutte contre les expulsions, par exemple.
En 2007, lors des travaux préparatoire de la réforme, il n’était pas prévu de distinguer entre les modes financement des différentes catégories de mandataires. Ce sont les dispositions règlementaires qui ont introduit un double système, avec un tarif forfaitaire pour les mandataires individuels et une dotation globale pour les services. L’UNAF est favorable à une harmonisation. Un travail est en cours en ce sens, depuis plusieurs mois. Il s’agirait d’une réelle mesure de simplification. Il faut éviter la complexité qui était reproché au système précédent.
Le contrôle comme l’évaluation sont essentiels pour faire progresser la qualité de service. En principe, en effet, les services mandataires sont soumis à un double contrôle : au contrôle judiciaire d’une part et, en tant que service du secteur médico-social, au contrôle administratif de fonctionnement du service. Cela entraîne des questions d’ordre éthique, notamment sur la confidentialité des données personnelles des majeurs protégés. Il y a matière à repenser le contrôle entre ces deux autorités et les faire travailler ensemble pour être plus opérant. Un travail est en cours à la DGCS sur la prévention de la gestion des risques et les contrôles des administrations déconcentrées : l’UNAF a formulé le souhait d’y être associée.
L’UNAF, à l’occasion de cette question sur les contrôles, a rappelé son opposition au décret du 8 novembre 2011 permettant aux greffiers en chef de confier à un huissier la mission de vérification des comptes annuels de la personne protégé, aux frais exclusifs de celle-ci, quand elle « en a les moyens ». En effet, le contrôle est une fonction régalienne de l’Etat et sur le principe, la personne protégée contribue déjà financièrement pour sa mesure de protection. Avec une telle mesure, elle est appelée à payer en plus le contrôle réalisé par huissier. Ce contrôle pouvant remonter sur plusieurs années, cela peut atteindre des sommes importantes.
La loi de 2007 a confié aux organismes de formation autorisés la formation et la remise du CNC par délégation de l’Etat. A ce jour, il n’existe aucun contrôle, aucune évaluation du dispositif global de formation. La loi prévoit que l’autorisation des organismes de formation est valable pour 10 ans. L’échéance de 2017 mériterait une évaluation globale de la mise en œuvre de la formation comme l’ensemble de la loi par une mission d’information parlementaire.
La reconnaissance de la profession passe aussi par la validation par un diplôme, d’autant que les prérequis pour accéder à la formation du CNC sont eux-mêmes des diplômes (travailleur social ou universitaire) L’UNAF a alerté sur la difficulté du métier de mandataire à exister dans le champ social et médico-social. Cela se voit déjà dans la convention collective 66 du secteur, mais aussi plus récemment dans les Etats généraux du travail social. Le CNC n’est pas reconnu au registre national des certifications professionnelles : cela va donc nous poser un vrai problème de prise en charge financière par les OPCA.
L’UNAF a émis globalement un avis positif sur le projet de loi portant adaptation de la société au vieillissement notamment dans ces articles relatifs à la protection juridique des majeurs.
En conclusion, l’UNAF a formulé le souhait qu’une mission parlementaire puisse se constituer pour évaluer l’application de la réforme de 2007 après huit ans de mise en œuvre. Un bilan est nécessaire pour voir les mesures d’ajustement nécessaires.
@ : cmenard unaf.fr - abrousse unaf.fr
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