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Rencontre nationale à Paris, des présidents des Udaf et Uraf et des directeurs des Udaf : allocution de la Présidente de l’Unaf

Le samedi 25 novembre 2023, l'Unaf a réuni, à Paris, les présidents des Udaf et Uraf et les directeurs des Udaf pour leur journée nationale. Retrouvez en ligne, les extraits de l'allocution de la Présidente de l'Unaf, Marie-Andrée Blanc.

Marie-Andrée Blanc présidente de l'Unaf

Au nom de l’ensemble de notre réseau, je souhaite d’abord exprimer notre solidarité envers les familles, les bénévoles, les salariés, des départements touchés par les intempéries, particulièrement dans le Pas-de-Calais. Avec la destruction de logements, d’équipements, de commerces, d’entreprises parfois, ce sont des vies « en morceaux » qui prendront du temps à se relever. Elles peuvent compter sur le mouvement de solidarité qui se met en œuvre dans les territoires concernés, avec la contribution des associations familiales.

Depuis cet été, un remaniement ministériel a conduit à la nomination d’une ministre des Solidarités et des familles, Mme Aurore Bergé.

Pour nous qui défendons la place des familles et la spécificité de la politique familiale, nous saluons ce retour à un ministère plein et entier en charge explicitement des familles, dans une approche universelle. Il témoigne de la portée de nos actions. Il doit contribuer à une meilleure reconnaissance des familles.

Nous sommes en contact très régulier avec la ministre et son cabinet. Certains de ses projets sont portés par l’Unaf depuis des années, comme celui de réformer le congé parental.

La nouvelle convention de gestion – la COG – passée entre l’Etat et la CNAF, va mobiliser des moyens importants pour les 5 ans à venir, en particulier pour l’accueil de la petite enfance. C’est pourquoi nous avons donné un avis favorable à sa signature. Nous vous avons présenté en septembre ses grandes lignes afin que vos représentants puissent travailler sur les Conventions pluriannuelles de leurs CAF.

Ces conventions ouvrent des opportunités pour le réseau des Udaf et des associations familiales, notamment en matière de parentalité, d’accompagnement des séparations ou de petite enfance. Avec la CNAF, notre volonté commune est de renforcer le partenariat entre nos organisations, en donnant plus de visibilité aux actions menées par notre réseau auprès des familles.

La DGCS est aussi un partenaire de premier plan. Au-delà du suivi de l’utilisation du fonds spécial, et de notre propre convention pluriannuelle d’objectifs, la DGCS supervise de nombreuses politiques publiques sur lesquelles notre réseau intervient.

Je remercie Anne Morvan-Paris, sous directrice de l’enfance et de la famille, qui est venue échanger avec nous. Votre présence nous est d’autant plus précieuse que vous avez également en charge la protection juridique des majeurs.

La protection de l’enfance nous mobilise également, tant en termes de gestion de services, que de représentations au niveau national et départemental. Je pense en particulier aux conseils de familles des pupilles de l’Etat, et aux observatoires départementaux.

Je remercie Anne Devreese, Présidente du Conseil national de la Protection de l’Enfance, où siège l’Unaf, de participer à la séquence sur ce sujet durant la matinée

La qualité des relations que nous entretenons avec les pouvoirs publics nous autorise à soutenir les projets favorables aux familles, mais aussi à alerter ou à nous opposer, aux mesures que nous estimons contraires aux intérêts des familles.

4 thèmes majeurs nous mobilisent actuellement :

1°) L’accueil de la petite enfance

L’Unaf poursuit son combat mené depuis de longues années, pour reconstruire le congé parental avec, à la clé, une indemnisation bien plus importante.

Nous avons enfin été entendus !

La ministre des Familles a annoncé la création d’un nouveau congé. Ses grandes lignes correspondent aux demandes que nous avions renouvelées lors des présidentielles et des législatives de 2022.

L’Unaf a été invitée à participer à la série de réunions tenues par la ministre aux côtés des partenaires sociaux pour réfléchir au contenu de la réforme. C’est la preuve de l’importance qui nous est accordée.

Nous sommes là pour faire des propositions. « Le diable se cachant dans les détails », nous serons très attentifs à ce que cette réforme, prévue pour 2025, soit à la hauteur des attentes des familles.

Par ailleurs, vous savez combien l’Unaf soutient, depuis l’origine, le projet de mise en place d’un Service public de la petite enfance – le SPPE.

Le projet de loi « plein emploi » en constitue une première brique, en donnant aux communes, une responsabilité d’autorité « organisatrice » en matière d’accueil du jeune enfant. Nous aurions souhaité davantage en prévoyant une obligation, afin de répondre aux besoins des parents. Même modeste, ce premier pas s’est heurté à de nombreuses oppositions au Parlement, conduisant même à son rejet par l’Assemblée. Nous sommes intervenus auprès des sénateurs et des députés des différents groupes afin de faire adopter cet article. Il a finalement été voté par les 2 assemblées.

Notre expertise dans ce champ est largement reconnue. Pour preuve, nos très nombreuses auditions dans le cadre des missions menées par l’IGAS, la Cour des comptes, l’Inspection générale des finances, ou encore au Parlement. Elles font suite, pour certaines, à de graves dysfonctionnements révélés dans des ouvrages récents.

Nous intervenons sur la qualité de l’accueil, sur les coûts supportés par les parents, sur leur place dans les crèches, et sur le problème du secteur à but lucratif. Ce secteur bénéficie d’outils lui permettant de se développer, mais, bien souvent, aux dépens de la qualité d’accueil, de la diversité de l’offre dans les territoires, des financements publics dont il profite largement, et aux dépens des parents qui supportent des restes à charge excessivement lourds et injustifiés. Nous attendons un véritable changement de politique permettant de mieux réguler le secteur marchand en réformant le statut des micro-crèches PAJE ainsi que le crédit impôt familles.

Concernant l’accueil en assistante maternelle, nous restons inquiets sur la réforme du complément mode de garde, annoncée pour l’année prochaine. Nous sommes favorables à mieux harmoniser les restes à charge pour les parents entre l’accueil collectif et individuel, mais nous n’acceptons pas qu’elle fasse plus de 40% de parents perdants, comme le gouvernement l’a indiqué.

Dans le même ordre d’idées, nous sommes défavorables au projet d’augmentation du plafond des participations familiales dans les crèches, qui se traduira par des surcoûts pour les parents de jeunes enfants.

2°) La question du pouvoir d’achat

La période d’inflation rend d’autant moins acceptable les projets que je viens d’évoquer, qui frapperont le « portefeuille des familles ». Avec plus de charges, les couples sont contraints à faire des arbitrages qui peuvent être préjudiciables à l’emploi des mères.

S’agissant des prestations familiales, nous avons demandé pour 2023 une anticipation de leur revalorisation ; malheureusement sans succès alors que nous l’avions obtenu en juillet 2022. Pourtant, le Haut Conseil de la famille l’a bien démontré : l’inflation et les pertes subies depuis des années auraient justifié ce geste.

Pour les familles, le 1er poste de dépenses reste le logement. Le contexte en ce domaine est toujours plus défavorable avec :

Avec la hausse des taux d’intérêt, les signaux sont passés au rouge « écarlate ».

Toute la chaine est bloquée : les familles ne parviennent plus à se loger, en locatif ou en accession, ou à trouver un logement qui corresponde à leurs besoins. Cela rend bien plus compliquée la mobilité nécessaire pour accompagner les changements de la vie familiale.

Ces difficultés concrètes sont bien connues des services d’accompagnement budgétaire des Udaf. Leur rôle est crucial en ces périodes délicates pour les familles.

Face à la décision de la Caisse des Dépôts de se retirer progressivement du financement des plates-formes de micro-crédit, nous travaillons actuellement avec différents acteurs comme la délégation interministérielle de lutte contre la pauvreté, la Banque de France, ainsi que le nouvel opérateur France travail, pour trouver des solutions alternatives.

Nous restons mobilisés sur le déploiement des Points Conseils Budgets, dont l’enjeu principal est aujourd’hui le financement des labels. Nous saluons le lancement par la DGCS et la DG Trésor d’une mission sur l’évolution de ce financement. Pour être force de proposition, nous lancerons en décembre un groupe de travail avec les Udaf, qui se basera sur les données d’activité et de besoins des usagers, issues de notre logiciel commun Budg&Co.

Enfin nous sommes en pleine discussion avec le Haut-Commissaire à l’Emploi, pour que des modalités de coopération soient possibles sur le terrain entre les Udaf et France Travail.

3ème thème d’actualité : l’accompagnement des parents

Suites aux émeutes, les pouvoirs publics réfléchissent aux moyens de responsabiliser davantage les parents. Nous avons rappelé leurs obligations mais aussi la difficulté de leurs charges.  

Parallèlement notre conseil d’administration a engagé une réflexion autour de la notion d’autorité parentale que le gouvernement envisage de faire évoluer.

Tout notre réseau est mobilisé sur le soutien à la parentalité par ses multiples actions et par ses représentations dans les comités départementaux des services aux familles. Les schémas départementaux seront bientôt dotés d’indicateurs de résultats.  Nous sommes en attente de l’arrêté ministériel qui en fixera la liste.

Plus globalement, nous souhaitons que l’Etat relance une véritable stratégie nationale de soutien à la parentalité.

Les parents n’ont pas toujours assez de temps pour s’occuper de leurs enfants. C’est pourquoi, nous défendons une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie familiale.

Vous êtes nombreux à avoir mené une enquête l’an dernier sur ce thème, dans le cadre de notre observatoire des familles. Le temps est venu de la valoriser dans vos territoires. Je salue l’organisation en Uraf et en Udaf d’évènements invitant les partenaires sociaux, employeurs, administrations, à venir discuter avec vous des résultats et des façons de répondre aux attentes des familles.

Certains parents sont confrontés à de lourdes difficultés nécessitant le recours à des mesures de protection de l’enfance. L’Etat devrait valoriser plus fortement les dispositifs qui ont démontré leur efficacité.

Je pense à la MJAGBF dont la loi Taquet a voulu faciliter le recours. Cet accompagnement reste encore trop mal connu, alors qu’il constitue un outil de prévention évitant certains placements d’enfants. Il est le moins coûteux des dispositifs de protection de l’enfance. Nous souhaitons que l’Etat nous aide à faire évoluer les pratiques des magistrats et des conseils départementaux pour un plus grand recours à ce dispositif.

Notre 4ème actualité porte sur la perte d’autonomie et le vieillissement.

Lors de l’examen du PLFSS pour 2024, nous avons obtenu une extension de l’indemnisation du congé proche aidant de 3 mois à 1 an.

Cette semaine, les députés ont repris l’examen de la proposition de loi sur le « bien vieillir ». La disposition élargissant l’habilitation familiale nous semble problématique à l’heure où le rapport d’Anne Caron Déglise remis en juillet a pointé les lacunes de cette mesure qui est exercée sans contrôle du juge. Des maltraitances, surtout financières, peuvent surgir dans l’entourage des personnes vulnérables. Nous plaiderons auprès du Sénat pour le retrait de cette extension.

Les Udaf subissent le manque d’attractivité des métiers des secteurs sanitaire, social et médico-social. Elles sont impactées par les difficultés de recrutement, de postes vacants, de turn-over des professionnels dont le travail n’est pas suffisamment reconnu. L’Unaf a obtenu de l’Etat, l’intégration des délégués-mandataires, des délégués aux prestations familiales et de leurs cadres, dans la revalorisation salariale issue de l’extension du Ségur. Les professionnels de l’Information et soutien aux tuteurs familiaux ainsi que les conseillers dans les Points Conseils Budgets ont également été inclus dans la revalorisation, grâce à l’action de l’Unaf. Ces mesures restent cependant insuffisantes pour traiter le fond du problème.

Il est indispensable qu’une convention collective unique reconnaisse les professionnels à leur juste valeur. Plusieurs métiers présents dans nos services ne figurent pas dans les conventions collectives actuelles, notamment ceux de mandataire judiciaire à la protection des majeurs et de délégué aux prestations familiales. D’autres métiers, comme ceux de la petite enfance, sont soumis à la concurrence entre les conventions collectives.

La négociation collective pour fusionner les conventions de 1951 et 1966 est au point mort. Il est urgent que le dialogue social reprenne. Nous souhaitons l’intervention de l’Etat pour faciliter la construction de cette convention collective unique. Cela passe par le financement des revalorisations indispensables à la pérennité du secteur social et médico-social.

En présentant la semaine dernière, la stratégie pour le Bien vieillir, la ministre, Aurore Bergé a annoncé, la création d’une « délégation interministérielle aux métiers du social, du médico-social et du soin ». Il s’agit de mieux coordonner les réponses sur l’attractivité et les conditions de travail des différents champs du secteur. L’Unaf demande que tous les métiers soient pris en compte, y compris ceux qui ne figurent pas dans les conventions collectives. Les réponses doivent porter sur tous les professionnels engagés auprès des familles, des enfants et des personnes, quelle que soit leur vulnérabilité.

Autre difficulté : dans les territoires, les créations de postes de mandataires libéraux se multiplient sans vision globale. De plus en plus de mesures leur sont confiées, alors qu’ils sont très peu contrôlés, qu’ils échappent aux exigences supportées par les services, et qu’ils gèrent parfois un nombre disproportionné de mesures.

 Cette politique alimente un système libéral qui est porteur de risques pour les personnes protégées. Elle fragilise tout le secteur en entraînant des départs de salariés formés par les associations, augmentant ainsi les vacances de postes au détriment du suivi des mesures de protection. Il est indispensable que l’Etat régule le secteur de la protection juridique des majeurs avec des lignes directrices claires à l’adresse des directions départementales, régionales et en étroite relation avec les Juges.

L’externalisation des contrôles des comptes de gestion, jusqu’à présent confiée aux directeurs de greffe, nous préoccupe également. Nous ne souhaitons pas qu’ils soient réalisés par des professions non réglementées, au risque de les transformer en un secteur marchand au détriment des personnes protégées qui vont devoir le financer. Nous estimons également que les coûts ne doivent pas être à la charge des personnes les plus modestes.

La protection juridique des majeurs concerne 70 % des salariés des Udaf. Cette situation nous conduit à considérer que le niveau du diplôme créé pour les mandataires – une licence professionnelle – n’est pas assez élevé au regard des compétences et des responsabilités exigées. En réponse à notre demande, la délivrance du CNC a été prolongée jusqu’à fin 2027 mais nous restons inquiets sur la capacité des universités qui délivreront cette licence, à couvrir les besoins de recrutements.

Enfin, à la suite du rapport de la Cour des Comptes, nous allons prendre le temps d’examiner les suites à donner aux recommandations. Nous sommes tout à fait favorables à poursuivre le travail mené avec la DGCS, avec, pour boussole, l’intérêt des familles et des personnes vulnérables que nous défendons et servons avec l’ensemble de notre réseau.