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Résolution visant à rendre effectifs les soins palliatifs sur tout le territoire national

Les députés ont adopté le 7 décembre 2023, une résolution visant à rendre effectifs les soins palliatifs sur tout le territoire national. Au cours des débats, la Ministre Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, a apporté des précisions concernant l’objet de cette résolution.

Actualité législative

Les députés ont adopté le 7 décembre 2023, une résolution ainsi rédigée :

« L’Assemblée nationale invite le Gouvernement à rendre effectifs les soins palliatifs sur tout le territoire national en garantissant un accès à tout citoyen qui en fait la demande, à sa famille ou à ses proches, en créant au moins une unité de soins palliatifs et une équipe mobile de soins palliatifs par département et en mettant ainsi effectivement en œuvre la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie. »

Au cours des débats, la Ministre Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé a précisé les points suivants concernant l’objet de cette résolution :

« L’enjeu de l’accompagnement de la fin de vie nous mobilise tous, parce qu’il nous renvoie à nos interrogations intimes, peut-être aussi à nos peurs, parce qu’il questionne notre vulnérabilité et nos doutes.

Je veux donc remercier le groupe Les Républicains pour avoir inscrit à l’ordre du jour cette proposition de résolution. C’est un moment important du débat démocratique, parce que ce texte aborde un sujet essentiel : l’égalité d’accès de nos concitoyens aux soins palliatifs. Je tiens également à remercier l’ensemble des professionnels de santé qui s’engagent au quotidien pour accompagner nos concitoyens en fin de vie.

Depuis plus d’un an, je suis pleinement mobilisée sur ce sujet au ministère. Je vous y sais très attentifs, comme en témoignent les travaux conduits sur ce sujet à l’Assemblée nationale, tels que la mission d’évaluation de la commission des affaires sociales sur la loi Claeys-Leonetti, les auditions du groupe d’études sur la fin de vie présidé par Olivier Falorni, mais aussi les nombreuses réunions et les débats que vous avez tenus dans vos circonscriptions.

Sur ce sujet, notre ambition est commune et pleinement partagée.

Notre ambition partagée est, bien sûr, de rendre effective la prise en charge palliative pour tous ceux qui en ont besoin sur le territoire national. Je partage pleinement la conviction qu’il nous faut améliorer l’équité d’accès en assurant l’information de tous : c’est l’un des fils conducteurs de mon action depuis ma prise de fonction.

Dans le cadre des travaux et des réflexions que j’ai engagés en septembre 2022, à la demande du Président de la République et de la Première ministre, sur l’accompagnement de la fin de vie, j’ai souhaité organiser des groupes d’études à l’Assemblée nationale et au Sénat pour que nous réfléchissions ensemble à des propositions sur l’anticipation et la culture palliatives.

Je voudrais d’abord rappeler d’où nous venons et évoquer le cadre dans lequel s’inscrit l’action du Gouvernement. Comme plusieurs orateurs l’ont souligné, le cadre juridique de la politique des soins palliatifs et de la fin de vie s’est structuré autour de trois grandes lois : la loi fondatrice du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs ; la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie ; la loi du 2 février 2016, issue d’un consensus transpartisan et défendue par Jean Leonetti et Alain Claeys, créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie.

Depuis 1999, nous avons progressé dans l’application du droit ouvert par l’article 1er A de la loi visant à garantir l’accès aux soins palliatifs, qui dispose que « Toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. » Vous y faites légitimement référence dans l’exposé des motifs de cette proposition de résolution, et je veux redire notre engagement en faveur de ce droit.

L’État a mené une action forte en matière de soins palliatifs. Au total, cinq plans nationaux de développement des soins palliatifs ont été déployés afin de renforcer l’offre de prise en charge palliative et d’assurer une égale répartition sur le territoire.

Le cinquième et dernier plan, comme vous le savez, a été lancé en 2021 pour une durée de trois ans ; 20 millions d’euros supplémentaires y sont consacrés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024. Ces plans montrent l’existence d’une volonté politique constante pour faire progresser l’offre de soins palliatifs, comme le souligne le rapport établi en 2023 par la Cour des comptes.

L’engagement de l’État en faveur des soins palliatifs représente 1,45 milliard d’euros en 2021. Il a progressé de 25 % depuis 2017, ce qui est inédit.

Cet engagement place la France dans la première moitié du classement des pays de l’OCDE, alors qu’elle se situait encore dans la moyenne basse en 2015. Je mentionne ces chiffres afin de rappeler que nous ne partons pas de rien, même si je suis lucide : il nous reste beaucoup à faire pour que les droits ouverts par la loi de 1999 soient appliqués mieux et plus largement.

L’offre actuelle de soins palliatifs est majoritairement orientée vers la prise en charge des adultes à l’hôpital. Elle s’est certes développée aussi au domicile, mais de manière encore trop limitée et inégale, aussi bien pour les interventions en résidence privée qu’en Ehpad, en particulier dans les territoires ultramarins.

Je voudrais cependant préciser certains chiffres souvent repris dans le débat public, en particulier concernant le nombre de départements qui ne disposent pas d’unités de soins palliatifs. Fin 2022, vingt départements ne disposaient pas d’unités de soins palliatifs. Cela ne signifie pas nécessairement qu’ils ne disposent pas d’une offre de soins palliatifs, mais que celle-ci y est notamment déployée dans les établissements sanitaires, où des lits lui sont dédiés. En outre, l’offre de soins palliatifs est également assurée, sur l’ensemble des départements, par 420 équipes mobiles de soins palliatifs et vingt-trois équipes régionales ressources en soins palliatifs pédiatriques.

Sur les vingt départements que j’évoquais, six ont bénéficié de crédits en 2022 et 2023, dans le cadre du cinquième plan national pour les soins palliatifs et la fin de vie, pour soutenir des projets de création d’unités qui sont en cours de déploiement. C’est un progrès, mais la situation demeure insatisfaisante.

Le Gouvernement s’est engagé pour que d’ici la fin 2024, la totalité des départements qui n’ont pas d’unité de soins palliatifs offrent une prise en charge de proximité des situations les plus complexes. Je suis pleinement mobilisée sur ce sujet.

Au-delà, ma conviction profonde, qui guide les travaux du Gouvernement sur ce sujet, est qu’il nous faut changer de logiciel sur les soins palliatifs. C’est pourquoi j’ai souhaité accélérer le déploiement du cinquième plan de développement des soins palliatifs. C’est également l’objet de la rénovation de la circulaire du 25 mars 2008 relative à l’organisation des soins palliatifs, ainsi que de l’ajustement des moyens alloués aux soins palliatifs pédiatriques.

Pour appuyer le plan national 2021-2024, l’instruction publiée en juillet dernier poursuit plusieurs objectifs essentiels afin de promouvoir une approche transversale et ouverte des soins palliatifs : renforcer le maillage des structures existantes et à venir ; optimiser les organisations professionnelles ; mobiliser plus massivement les professionnels de ville ; améliorer l’accès à l’expertise palliative ; surtout, introduire plus en amont les soins palliatifs dans le parcours de soins. Cette nouvelle instruction, quinze ans après la circulaire qui régissait les conditions de l’offre de soins palliatifs, constitue une étape essentielle dans le développement de véritables filières structurées de soins palliatifs.

Elle forme la première brique de la stratégie décennale pour les soins palliatifs, la prise en charge de la douleur et l’accompagnement de la fin de vie 2024-2034, annoncée par le Président de la République le 3 avril dernier. Une instance dirigée par le professeur Franck Chauvin a été chargée de préfigurer cette stratégie. Depuis juin dernier, d’intenses travaux associant largement les expertises ont été menés ; leurs conclusions me seront présentées la semaine prochaine.

La future stratégie décennale constituera le cadre d’action pour les dix prochaines années. D’ores et déjà, je puis vous annoncer que la diffusion d’une culture palliative au sein de la communauté des professionnels de santé, mais aussi de la société dans son ensemble, en constituera l’une des priorités. Nous voulons instaurer l’accompagnement le plus en amont possible.

En outre, nous consacrerons un effort spécifique aux capacités de prise en charge en ville et dans les Ehpad, ainsi qu’au développement de l’offre de soins palliatifs pédiatriques. L’un d’entre vous l’a évoqué, la formation des professionnels de santé – de manière très large – en constituera également un volet important.

Enfin, la stratégie prendra en compte les conclusions rendues en avril 2023 par la Convention citoyenne sur la fin de vie, qui, vous l’avez rappelé très justement, a insisté sur la nécessité de renforcer l’accès aux soins palliatifs.

Mesdames et messieurs les députés, nous partageons donc le diagnostic sur la nécessité de renforcer plus avant notre offre de soins palliatifs, même si nous ne souscrivons pas aux conclusions selon lesquelles le Gouvernement ferait preuve d’attentisme sur ce sujet. Au contraire, nous sommes pleinement mobilisés.

Si je remercie M. Patrick Hetzel d’avoir inscrit ce sujet à l’ordre du jour, je soutiens que l’action du Gouvernement satisfera pleinement votre proposition de résolution.

Appliquer la loi est un objectif qui nous réunit tous. Cela ne doit pas nous interdire de la faire évoluer. Nous nous retrouverons dans quelque temps pour en débattre. »

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